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Cédéao : vers un financement urgent de la Force en attente
( 23 juin 2025 | 19:24 )
La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a décidé dimanche 22 juin de convoquer une réunion conjointe extraordinaire de ses ministres des Finances et de la Défense pour résoudre l'épineux dossier du financement de la Force en attente de la Cédéao (FAC).
Cette décision, prise lors du 67e sommet ordinaire de l'organisation à Abuja, témoigne de l'urgence accordée par les dirigeants ouest-africains à l'opérationnalisation de leur force antiterroriste régionale, annoncée depuis décembre 2024 mais freinée par des contraintes budgétaires majeures.
Dans son discours de passation de pouvoir, le président nigérian Bola Ahmed Tinubu, qui cède la présidence tournante de l'organisation à son homologue de la Sierra Leone, Julius Maada Bio, a martelé l'impératif d'une action immédiate, indiquant que « la Force en attente de la Cédéao doit passer du concept à la réalité opérationnelle dès maintenant. »
Cette exhortation intervient alors que les attaques jihadistes continuent d'endeuiller plusieurs États membres, mettant en lumière l'urgence d'une réponse collective coordonnée face à la menace terroriste transfrontalière.
Escalade sécuritaire régionale
La situation sécuritaire s'est particulièrement dégradée ces derniers mois dans plusieurs pays membres. Le Bénin a ainsi enregistré l'attaque la plus sanglante de son histoire en avril dernier avec la mort de 54 soldats, une opération revendiquée par le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (JNIM), branche sahélienne d'Al-Qaïda.
Le Nigeria, pays le plus peuplé de la région, demeure confronté à une insurrection jihadiste multiforme menée par Boko Haram et sa branche affiliée à l'État islamique, l'État islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap). Le Togo n'est pas épargné par cette expansion de la menace terroriste vers les pays côtiers du golfe de Guinée.
Infrastructure militaire opérationnelle
Le sommet a marqué une avancée significative avec l'achèvement du dépôt logistique militaire régional de Lungi, en Sierra Leone. Cette infrastructure stratégique, destinée à soutenir les futures opérations de la FAC, constitue un jalon important dans l'architecture sécuritaire régionale.
Le Nigeria a par ailleurs réitéré son engagement à assurer le transport stratégique maritime et aérien de la force, conformément aux accords signés en février 2025 à Addis-Abeba. Cette contribution logistique majeure de la première puissance économique régionale souligne l'importance stratégique accordée au projet.
Déploiement par phases
L'architecture opérationnelle prévoit le déploiement initial d'une brigade antiterroriste de 1 650 militaires, constituant le noyau dur d'une force qui devra ultimement compter 5 000 hommes. Cette montée en puissance progressive s'inscrit dans le cadre du Plan d'action 2020-2024 contre le terrorisme, actuellement en cours de révision pour adapter les stratégies aux évolutions du contexte sécuritaire.
Les travaux préparatoires intensifiés ces derniers mois, notamment la réunion technique du 24 au 28 février 2025 à Abuja, ont permis de définir les fondements logistiques, opérationnels et juridiques de la FAC avec la participation d'experts militaires et de responsables sécuritaires de l'ensemble des États membres.
La passation de pouvoir entre Bola Tinubu et son successeur Julius Maada Bio s'effectue dans un contexte sécuritaire particulièrement tendu. Les chefs d'État ont unanimement reconnu que le succès de la Force en attente dépend désormais de leur capacité à mobiliser les ressources financières internes et à transformer leurs engagements politiques en actions concrètes.
Cette initiative régionale s'inscrit dans une dynamique plus large de prise en charge autonome des questions sécuritaires par les organisations africaines, dans un contexte de redéfinition des partenariats internationaux en matière de lutte antiterroriste au Sahel.
AP/APA