L’histoire n’est pas forcément un éternel recommencement, mais elle est riche d’enseignements. Le cas de Neville Chamberlain qui a négocié avec Adolf Hitler en 1938 a montré les limites de la diplomatie de l’apaisement.
Vouloir la paix, c’est une belle grandeur d’âme. Et entre gens raisonnables, c’est toujours possible. Toutefois, la stratégie diplomatique du Premier ministre anglais Neville Chamberlain de 1937 à 1940 a montré ses limites face à un tyran. Ce dernier n’avait jamais caché ses ambitions territoriales, confirmées avec l’annexion de l’Autriche dès mars 1938 (l'Anschluss). Pourtant, le gouvernement britannique, Chamberlain en tête, a tenté de faire entendre raison au dictateur de Berlin en négociant la paix en marge de la crise des Sudètes de septembre 1938 en Tchécoslovaquie. Neville Chamberlain prendra son avion le 15 septembre pour rencontrer Adolf Hitler à Berchtesgaden. La première rencontre n’ayant pas abouti, il retournera en Allemagne les 22 et 23 septembre 1938. Cela aboutira aux accords de Munich…
Bout de papier
Le 24 septembre, sur la piste de l’aérodrome de Heston à Londres, Chamberlain fera des déclarations rassurantes en brandissant les actes d’un accord. « « Mes chers amis, pour une deuxième fois dans notre histoire, un Premier ministre britannique est revenu d’Allemagne en rapportant la paix avec honneur. Je crois que c’est la paix pour notre temps. » Les 29 et 30 septembre, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Italie signent les accords de Munich. Sans même prendre la peine d’inviter Staline (URSS) et les principaux concernés : la Tchécoslovaquie et la Pologne. Il est notamment imposé à Prague de faire évacuer les Tchèques des Sudètes pour le 10 octobre, ainsi que la rétrocession de la Silésie à la Pologne. Des concessions jugées nécessaires pour régler les différends avec l’Allemagne. Les fanfaronnades optimistes de Chamberlain en Grande-Bretagne et de Daladier, président du conseil, acclamé à son retour en France (« la paix est sauvée ») ne changeront rien aux ambitions d’Hitler.
Un danger
Un homme avait bien compris le danger d’un accord avec Hitler : Winston Churchill. Dès le 5 octobre 1938, il prononcera un discours devant la Chambre des Communes dénonçant ces accords : « une défaite totale ». Pour lui cet apaisement est un danger pour toute l’Europe et que son pays allait bientôt devoir choisir entre « la guerre et le déshonneur ». Et il avait raison. L’Allemagne piétinera sa signature en envahissant la Tchécoslovaquie en mars 1939. Après ce sera la Pologne et puis l’embrasement général de la 2e Guerre mondiale. Et la ténacité de Churchill face à Hitler jouera un rôle déterminant dans la victoire finale face à l’Allemagne nazie en 1945. Il n’était pas dupe sur les intentions allemandes et avait compris que le sacrifice serait nécessaire.
Des leçons à tirer
Les parallèles entre le présent (en Ukraine par exemple) et le passé sont sans doute hasardeux. Mais la politique de « l’appeasement » des années 1930, toute vertueuse est-elle, a montré ses limites face à l’ambition d’un régime fondé sur la force et le pouvoir. De plus, les accords de Munich ont été signés sans même prendre la peine d’inviter les pays concernés (la Tchécoslovaquie et la Pologne) sous la menace allemande. Par ailleurs, même le dictateur Staline fera les frais de la turpitude d’Hitler qui n’hésitera à attaquer l’Union soviétique en juin 1941 avec l’opération Barbarossa malgré la signature d’un traité de non-agression en 1939. Les enjeux diplomatiques et géopolitiques sont parfois complexes et souvent malléables à merci. Néanmoins, faut-il espérer une solution sans mettre autour de la table toutes les parties concernées ? Et l’appétit territorial pousse-t-il à perdre la raison à celui qui lorgne sur son voisin ? Enfin, faut-il accepter toutes les concessions face à des régimes préconisant la puissance militaire ou financière à tout prix ?
(Olivier Duquesne – Sources : US Holocaust Memorial Museum & Wikipedia - Picture : © picture-alliance / United Archives/TopFoto | 91050/United_Archives/TopFoto)
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2025-02-14T10:48:32Z